19 mai 2017

Sierra Blair-Coyle

(info sur Sierra Blair-Coyle)

Passion, dévouement et entraînement

Thomas Kieller

Photo – Copyright Jackie Sterna

Sierra Blair-Coyle : À l’envers.

Avec un style de grimper fluide et intuitif, Sierra attaque les problèmes au bloc dans les compétitions relevées de la Coupe du monde de la « International Federation of Sport Climbing » (IFSC). Quand elle fait face à une situation difficile, elle n’hésite pas à improviser rapidement. Sa créativité l’a aidé à de nombreuses reprises à trouver la bonne façon de faire le prochain mouvement. Sur le mur, elle veut faire les mouvements d’une manière efficiente en utilisant à son avantage sa flexibilité et sa taille. De plus, elle ne manque pas de détermination. Tout en s’entraînant et en prenant part aux compétitions d’escalade à un niveau professionnel, l’Américaine a gradué de la « Arizona State University » avec un diplôme en marketing. Elle veut aussi améliorer davantage sa condition physique et certains points techniques de l’escalade. Définitivement, les objectifs et la passion de Sierra la mèneront au sommet.

L’entrevue téléphonique a été réalisée le 9 mai 2017 à 10h lorsque Sierra était à Scottsdale, États-Unis.

Entraînement d’une grimpeuse

Thomas Kieller : Quel type d’exercices fais-tu pour améliorer la force de ton haut du corps et de tes jambes?

Sierra Blair-Coyle : L’escalade en soi est bien entendu un entraînement complet pour le corps. Ton haut du corps travaille plus lorsque tu grimpes en surplomb et tes jambes travaillent davantage dans les ascensions verticales. C’est intéressant car lorsque je grimpe ardemment sur des blocs verticaux (plus spécifiquement le « slab ») mes jambes sont endolories le jour suivant. Je ne suis vraiment pas habitué à cela. Pour quelque raison que ce soit, je n’ai pas grimpé de telles surfaces récemment.

Quand je ne suis pas sur le mur, c’est définitivement les exercices typiques que tout le monde fait comme les tractions, les push-ups (pompes), les anneaux, les squats (flexion des jambes), les squats avec saut, les fentes, les burpees, etc. Je fais tout cela. Parfois, je fais un exercice sur une échelle à l’envers qui est à 35o degrés. Je grimpe sans utiliser mes jambes. Cela améliore beaucoup ma force du haut du corps.

Thomas : J’aimerais savoir, l’escalade, est-ce que cela sollicite plus le haut du corps ou les jambes?

Sierra : À vrai dire, tu dois travailler tout. En soi, l’escalade sollicite un peu plus le haut du corps. Toutefois, il faut avoir un corps très fort dans l’ensemble. De cette façon, tout est plus facile.

Thomas : Et que fais-tu pour ta poigne?

Sierra : Je fais beaucoup d’exercices en utilisant seulement des élastiques en caoutchouc afin de travailler les muscles opposés de mes mains. C’est vraiment bon pour l’escalade et aussi pour éviter les blessures.

Thomas : Lors d’une compétition au bloc, il est possible de voir des manœuvres demandant beaucoup de flexibilité. Est-ce que tu travailles cette facette ou c’est naturel pour toi?

Sierra : Heureusement, je suis naturellement flexible mais je dois dire que je m’étire à tous les jours.

Thomas : Tu peux être un bon moment sur le mur, que fais-tu pour ton endurance musculaire et pour ton système cardio-respiratoire?

Sierra : Je ne fais pas beaucoup d’exercices cardio. Toutefois, lorsque j’en fais, je fais un entraînement fractionné de haute intensité (HIIT : high-intensity interval training). En ce qui concerne l’endurance requise sur le mur, je fais beaucoup d’exercices combinant la puissance et l’endurance. À ce sujet, mon exercice de prédilection s’appelle le quatre par cinq. Il y a plusieurs variations mais à la base ce que j’essai de faire c’est de grimper un problème au bloc quatre fois en quatre minutes. Puis, je prends quatre minutes de repos. Je répète cela sur cinq différents problèmes. Cela aide définitivement mon endurance.

Thomas : Je vois bien que tu te pousses vraiment concernant l’endurance musculaire. Le cardio n’est pas très présent lors des compétitions au bloc?

Sierra : Je pense que cela dépend de la manière que tu grimpes cette journée-là. Si tu grimpes beaucoup, cela peut devenir cardio. Toutefois, si durant la compétition tu tombes beaucoup et que tu ne fais que le premier mouvement sur chaque problème au bloc, eh bien tu ne ressentiras probablement pas l’aspect cardio. Par contre, si tu te rends loin dans chacun d’eux, tu vas sûrement le ressentir. Cela dépend vraiment de ce que tu fais. Si tu réussis du premier coup, eh bien c’est super parce que tu peux te reposer dix minutes. Donc vraiment, cela dépend de ta performance.

Thomas : Actuellement, qu’est-ce que tu veux améliorer au niveau de ta condition physique et concernant l’aspect technique de l’escalade?

Sierra : Concernant la condition physique, j’ai besoin d’épaules fortes. Je travaille là-dessus, mais je dois définitivement forcer encore plus sur ce point. J’ai vraiment de bonnes idées sur ce que je dois faire. Pour l’aspect technique, j’ai réalisé que je ne suis pas très bonne à me tenir sur un mur avec une petite inclinaison. Je vais travailler là-dessus. C’est devenu clair pour moi après ma récente compétition à Tokyo, Japon.

Thomas : À la maison, tu as une impressionnante salle d’escalade avec beaucoup d’équipements. Est-ce que cela rend l’entraînement bien plus aisé?

Sierra : Cela aide définitivement. La meilleure chose que j’en retire c’est que j’ai le contrôle sur ce qu’il y a sur le mur. Dans un gymnaste typique d’escalade, je n’ai pas le contrôle à ce niveau. Donc, à la maison, je peux travailler les points que j’ai besoin d’améliorer. C’est très aidant.

Thomas : L’escalade est définitivement un sport complet. Tu es une compétitrice de la Coupe du monde depuis 2010. Est-ce que tu as vu une amélioration de la condition physique des femmes prenant part à ces compétitions?

Sierra : Oh oui! Tout le monde s’améliore significativement. Pour ma part, je sens que je me suis amélioré si je me compare à quelques années auparavant. Vraiment tout le monde devient meilleur. Le niveau augmente continuellement. Il semble que chaque année je dois m’entraîner davantage, je dois persévérer et continuer à m’améliorer.

Désir de se surpasser

Thomas : Quand tu étais plus jeune, est-ce que tu avais un grimpeur comme modèle et pourquoi cette personne t’a inspiré?

Sierra : Honnêtement, il n’y avait personne à proprement dit. Je pense que j’ai été influencé par le gens autour de moi et par la communauté du monde de l’escalade qui est vraiment grande en Arizona, États-Unis. Je poursuivais toujours les meilleurs grimpeurs et cela m’a aidé à être le meilleur que je puisse être. Donc, je pense que d’une certaine manière, j’essayais tout simplement de continuer.

Thomas : Lors d’une compétition au bloc, quelle est l’attitude que tu adoptes face à un problème?

Sierra : Pour moi, j’observe tout simplement le problème, je cherche ce que je veux faire, j’attaque le problème et j’essaie de passer à travers au premier essai. Je dis toujours que si tu peux le faire, tu devrais être capable d’y parvenir du premier coup. Tu n’as pas beaucoup de temps pour trouver la solution. Donc, j’essaie de passer à travers le plus rapidement possible.

Thomas : Afin de faire face au problème, est-ce que tu prends un peu de recul ou bien tu fonces. Quelle est la meilleure façon pour toi d’attaquer le problème?

Sierra : À vrai dire, c’est un mixte des deux. Oui, tu dois bien observer afin de rien manquer, mais tu ne veux pas consacrer trop de ton temps. Je pense que j’essaie de bien observer mais tout en le faisant rapidement.

Thomas : En escalade, il est facile de sortir de sa zone de confort. Comment fais-tu pour revenir dedans rapidement?

Sierra : Je pense que cela dépend de la situation. Ce n’est pas toujours facile d’être sorti de sa zone de confort. C’est mieux d’attaquer la situation au lieu de rester là et de s’en soucier. C’est toujours cela que j’essaie de faire. Si je me trouve dans une situation difficile, je vais de l’avant et j’apprends de cette expérience.

Passion pour l’escalade

Thomas : Je sais que dans les compétitions d’escalade, tu dois performer. C’est l’objectif principal! Est-ce qu’il y a une place pour t’exprimer, c’est-à-dire de le faire selon ton style de grimper?

Sierra : Je pense qu’avant tout c’est de la performance. Tous les compétiteurs ont des mouvements et des gestes où ils excellent plus et qu’ils préfèrent faire. Mais avant tout, il faut performer.

Thomas : Tu peux t’exprimer plus quand tu fais de l’escalade en plein air, selon tes termes…

Sierra : Oui, je pense que c’est plus facile mais je peux quand même le faire un peu en compétition. Bien entendu, c’est plus facile de s’exprimer dans un autre contexte que la compétition.

Thomas : Qu’est-ce que tu apprécies tant de l’escalade sur un bloc, une falaise, dans une cave ou sur un mur?

Sierra : C’est super plaisant. J’aime bien la sensation d’arriver au sommet surtout lorsque ce fut pour moi un bon défi. Je pense vraiment que c’est cela… Au bout du compte, cela se résume à être capable d’atteindre un but et cela donne une très bonne sensation!

Thomas : D’aller à l’extérieur et de faire face a une falaise ou un gros rocher accompagné d’amis, est-ce que c’est quelque chose qui te rend bien heureuse?

Sierra : Oui, c’est relaxant et c’est tout simplement plaisant d’être avec des amis. Tout le monde grimpe. Lorsqu’on va en voyage, il en ressort toujours une bonne histoire à raconter. J’apprécie toujours ces journées-là. De plus, il y a beaucoup de choses qui arrivent et, bien entendu, nous passons un bon moment.

Thomas : Merci Sierra d’avoir partagé tes connaissances sur l’escalade.

Sierra : Merci beaucoup.