30 mai 2004
Roberto Brum
(info sur Roberto Brum)Le feu de Coritiba
Thomas Kieller
Photo – Copyright Coritiba Football Club
Déterminé, passionné et d'un enthousiasme contagieux, Roberto est un véritable guerrier sur le terrain. Sa très bonne condition physique fait de lui un joueur efficace tant à la défense qu'à l'attaque. Fort et endurant, il harcèle l'adversaire afin de récupérer le ballon. Rapide et créatif, il génère de nombreuses occasions de marquer. Il est d'ailleurs un redoutable buteur avec ses coups de pied canon. Sa plus grande qualité est sans aucun doute sa détermination sans pareil. Son intensité déteint sur ses coéquipiers ce qui fait de Coritiba une équipe unie où Roberto en est une flamme vive.
L'entrevue a été réalisée le 30 janvier 2004 à 14h dans les bureaux du Coritiba Football Club au stade Couto Pereira à Curitiba, Brésil. Elle a été faite en anglais et en portugais avec l'aide d’une traductrice.
Prélude – Roberto, fort bien habillé, arrive dans les bureaux de très bonne humeur. Il salue tout le monde personnellement. Son entrée crée une euphorie dans la salle.
Préparation d'un footballeur
Thomas Kieller : Quels sont les habilités et les qualités physiques qu'un milieu de terrain, comme toi, doit améliorer?
Roberto Brum : À ma position, je dois être très bon dans le marquage et donner l'appui dont les défenseurs ont besoin pour préparer l'attaque et marquer les buts dont une équipe a besoin pour gagner un match.
Thomas : Durant la saison, combien de fois t'entraînes-tu par semaine? Et pendant combien d'heures?
Roberto : Nous nous entraînons à temps plein toute la semaine. Le matin, nous nous entraînons pendant 2 heures ou 2 heures 30 minutes. Ensuite, nous allons dîner. L'après-midi, nous retournons nous entraîner pendant une période de temps semblable à celle du matin. Je crois que cela suffit pour nous préparer au match du week-end. En plus des périodes d'entraînement pendant la semaine, nous avons une période de concentration la journée précédant les matchs (généralement les matchs ont lieu le dimanche et le mercredi).
Thomas : Par exemple, le lundi que fais-tu?
Roberto : Le lundi, nous avons un entraînement dit régénérateur, pour nous aider à récupérer après le match du dimanche. Nous faisons de la natation, des étirements.
Thomas : Pendant les entraînements plus techniques que fais-tu comme exercices?
Roberto : Pendant la semaine, nous faisons les exercices que toutes les équipes font. Ça change d'un comité technique à l'autre, mais la philosophie de travail est pratiquement la même : des exercices avec le ballon, des exercices physiques, des exercices de finition, des collectifs (des matchs où tous les joueurs d'une équipe, divisés en deux groupes - équipe A contre équipe B, jouent ensemble). Cela nous procure la préparation dont nous avons besoin pour bien jouer lors des matchs.
Thomas : Tu es reconnu comme possédant une endurance exceptionnelle. Tu marques bien ton adversaire et tu es un joueur rapide. Premièrement, est-ce vrai? Peux-tu nous dire quelles sont tes forces en tant que footballeur?
Roberto : Cela est vrai. Ça fait partie de ma nature. C'est Dieu qui m'a donné cette capacité physique qui me permet de jouer, de courir plus qu'un match par jour. Aujourd'hui, avec l'évolution du football, nous bénéficions de l'aide de la physiologie. En plus de ma vigueur physique, j'ai d'autres qualités que les joueurs qui occupent ma position n'ont pas d'habitude : partir avec le ballon de notre zone et développer le jeu, fournir l'appui nécessaire à mes collègues et tirer au but de l'extérieur de la zone de réparation.
Thomas : Quand tu étais plus jeune, as-tu pratiqué ces habilités et ces qualités physiques?
Roberto : Je viens d'une famille modeste et je crois que c'est mon alimentation qui m'a permis d'avoir la structure que j'ai aujourd'hui. Quand j'étais enfant, je mangeais des aliments que les jeunes d'aujourd'hui ne mangent pas, que ma fille, par exemple, ne mange pas : du riz, des haricots, du pot-au-feu, des mets à base de maïs. Aujourd'hui, les jeunes ne mangent que du McDonald's, du Bob's (fast-food brésilien)… Je crois que c'est l'alimentation que j'avais quand j'étais enfant qui m'a permis d'avoir cette bonne condition physique.
Thomas : Les Brésiliens sont connus pour avoir un excellent contrôle du ballon. Quels sont les exercices que vous pratiquez pour améliorer cette habilité?
Roberto (tout en souriant) : Je crois que Dieu, lorsqu'il a créé le foot, il a dit : « Je vais accorder à ce pays-ci - qui est le Brésil - le don de bien jouer au football, et je vais faire en sorte que les joueurs de ce pays soient les meilleurs au monde ». C'est la seule explication que j'ai car nous, les Brésiliens, savons faire tout ça déjà au moment de notre naissance. Nous n'avons pas besoin de nous entraîner.
Thomas (rit en entendant la dernière réponse de Roberto) : Plusieurs joueurs ont beaucoup d'habilités et de qualités physiques, mais certains d'entre eux manquent d'intensité durant les matchs. Tu es reconnu comme un joueur intense. Est-ce que cet aspect du jeu est très important au niveau professionnel?
Roberto (un peu plus sérieux) : Cela est très important dans le football d'aujourd'hui. Dans le football contemporain, il n'y a plus de place pour les joueurs qui manquent de détermination, qui ne se battent pas. Il y a trois décennies, la technique suffisait. L'athlète qui n'évolue pas, qui ne comprend pas qu'il faut intégrer les deux choses, qu'il faut associer la technique et la force, l'ardeur, la détermination, ne réussira pas dans le football.
Thomas : Hormis le fait que tu t'entraînes fort, est-ce que tu portes une attention particulière à ton alimentation? Est-ce qu'une nutritionniste t'aide?
Roberto : Nous bénéficions de l'aide de plusieurs professionnels parmi lesquels une diététicienne engagée par notre club. Moi-même j'ai engagé une cuisinière pour s'occuper de mon alimentation, car j'ai besoin de bien manger pour avoir assez d'énergie le lendemain lors de l'entraînement. Cet aspect est essentiel pour moi.
Thomas : Est-ce que tu as l'aide de spécialistes comme un entraîneur personnel, un physiothérapeute ou un psychologue sportif?
Roberto : J'ai le bonheur de travailler pour une équipe qui m'offre toutes les ressources dont je peux avoir besoin. Le Coritiba Football Club offre les services de tous ces professionnels : psychologue, diététicienne, préparateur physique. Il fournit toutes les ressources dont un athlète a besoin pour bien jouer.
Thomas : Est-ce que tu as déjà eu une blessure grave?
Roberto : Je n'ai jamais eu de blessure pouvant m'empêcher de jouer. Cela fait deux ans que je travaille pour le Coritiba et je n'ai jamais été exclu d'un match à cause d'une blessure.
Thomas : Est-ce que tu pratiques ou pratiquais-tu d'autres sports comme le foot-volley, le football sur la plage ou un tout autre sport?
Roberto (sourit lorsqu'il m'entend parler de foot-volley, un sport qu'il apprécie) : Je suis né à Rio de Janeiro, et je ne pratique le foot-volley que lorsque j'y retourne pendant mes vacances de fin d'année, car à ce moment-là je passe mes journées sur la plage.
Thomas : Est-ce que tu pratiques d'autres sports, par exemple le basket-ball, la natation ou le vélo?
Roberto (en riant) : Non. J'apprécie ces sports, mais mon truc est plus le football.
Thomas : Quel est ton meilleur souvenir de football?
Roberto : Le moment qui m'a le plus marqué, c'est lorsque le Coritiba a obtenu le titre de champion invaincu en 2003. C'est un moment historique, car aucun autre club n'avait obtenu ce titre depuis 1936. C'est un titre qui a apporté beaucoup de joie à nos supporteurs.
Thomas : Quand tu as grandi avais-tu un modèle? Qui était-il et pourquoi?
Roberto : J'admirais plusieurs joueurs. Quand j'étais jeune, j'ai vu jouer Zico, Romário et Dunga. J'ai une admiration particulière pour ces joueurs que j'ai vu jouer. J'ai entendu parler de Pelé et Garrincha, mais je n'ai pas eu le privilège de les voir jouer. Un autre athlète que j'admirais beaucoup est Maradona, un joueur argentin; et Veron qui est lui aussi argentin. J'admire plusieurs athlètes, mais aucun ne m'a servi de modèle en particulier. J'ai mon propre style, ma propre façon de jouer.
Thomas : Quel joueur as-tu le plus apprécié et pourquoi?
Roberto (affirme avec entrain) : C'est Dunga, de par sa façon de jouer, qui a le plus apporté à ma carrière. Il était déterminé, il avait un grand leadership. Lorsque je suis devenu professionnel et que j'ai commencé à jouer pour le Fluminense, M. Carlos Alberto Parreira, qui était mon entraîneur à l'époque, m'a comparé à Dunga, le capitaine de l'équipe nationale dirigée par M. Parreira. J'étais heureux d'entendre cela. Mon admiration pour lui a augmenté et j'ai essayé un peu de suivre ses pas.
Thomas : Selon toi, qui sont en ce moment les meilleurs joueurs du monde et pourquoi?
Roberto : La plupart des meilleurs joueurs font partie du Real Madrid, une équipe que j'admire. Ce sont Roberto Carlos, Ronaldo, Zidane et Figo. Il y a aussi certains joueurs au Brésil, comme Alex (de Cruzeiro), par exemple, qui est dans une bonne période, une phase spéciale de sa carrière.
Thomas : Pourquoi selon toi sont-ils les meilleurs joueurs?
Roberto : Ils sont des joueurs géniaux. Ils ne sont pas prévisibles. À n'importe quel moment, avec leur talent naturel, ils peuvent changer l'issue d'un match. Et ce n'est pas à cause de l'entraînement, mais à cause de leur don.
À propos de la ligue brésilienne de football et du Coritiba
Thomas : Quelles sont les caractéristiques de la ligue brésilienne de football en comparaison avec les autres grands championnats comme ceux de l'Angleterre, de l'Espagne et de l'Italie?
Roberto : C'est difficile de comparer parce qu'il y a des différences régionales en ce qui concerne la façon de jouer. Il y a une façon de jouer à Rio, une autre à São Paulo, une autre dans le Sud et une autre dans le Nordeste. Je pense que la façon de jouer dans le Sud ressemble plus à celle qu'on voit dans le football européen. C'est une façon combative de jouer. On se dispute le ballon et il y a le même genre de marquage. Nous pouvons citer comme exemple le Grêmio, qui a été pour la deuxième fois champion de la coupe Libertadores. Je suis sûr que le Coritiba a aussi de grandes chances d'être champion. Le Coritiba représente le Sud du pays. Il a cette responsabilité et peut s'inspirer de ce que le Grêmio a accompli pour gagner la coupe Libertadores.
Thomas : Quels sont les forces du Coritiba?
Roberto (dit énergiquement) : La caractéristique principale du Coritiba est l'union de ses joueurs. Les joueurs du Coritiba jouent de façon collective. Ils ne jouent pas de façon individuelle. Lorsqu'on remporte un match, ce n'est pas l'affaire d'un seul joueur. Chacun des joueurs apporte sa contribution pour que le groupe soit fort. Ce qui rend le Coritiba fort également, c'est la participation de ses supporteurs. Ils sont comme un 13e joueur, surtout lors des matchs à domicile.
Thomas : Est-ce que les supporteurs du Coritiba sont très enthousiastes?
Roberto : Les supporteurs du Coritiba sont fidèles. Ils sont toujours présents dans les moments difficiles et dans les bons moments aussi. Cela fait une différence et c'est une des raisons pourquoi j'ai décidé de quitter mon ancienne équipe, où j'avais joué pendant onze ans, pour venir jouer dans l'équipe du Coritiba.
Thomas : Donc, si nous sommes à Curitiba, est-ce qu'on devrait venir à un match du Coritiba, surtout lors de la coupe Libertadores?
Roberto (en riant un peu) : Ça vaudrait la peine de venir voir le Coritiba jouer même si le billet coûtait deux fois plus cher. Le Coritiba prend part au championnat de la Coupe Libertadores pour être champion. Il entre dans le championnat pour gagner, pour être la meilleure équipe et pour montrer qu'il n'est pas seulement la meilleure équipe du Sud, mais la meilleure du Brésil.
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