5 octobre 2016
Annika Beck
(info sur Annika Beck)L’entraînement rigoureux d’une joueuse de tennis
Thomas Kieller
Bien concentrée sur ses objectifs, Annika démontre son talent et sa détermination lors de ses entraînements ainsi que sur un court de tennis. La joueuse allemande a déjà fait preuve de mordant depuis qu’elle a rejoint le circuit de la Women's Tennis Association (WTA) en 2009 à l’âge de 15 ans. Elle a remporté deux titres en simple et un autre en double tout en représentant son pays à la Fed Cup à deux reprises. Elle a déjà réalisé de bons coups en remportant, entre autres, des matchs aux dépens d’Agnieszka Radwanska, Samantha Stosur et Simona Halep. Son style de jeu repose plus sur la ligne de fond où elle démontre sa combativité de son coup droit. Disciplinée et passionnée de tennis, on voit bien que son futur sur le circuit est des plus prometteurs.
L’entrevue a été réalisée le 14 septembre 2016 à 16h50 dans la salle de conférence de presse du tournoi Coupe Banque nationale de la WTA Tour à Québec, Canada.
Prélude – Annika entre dans la salle de conférence de presse d’un air détendu et bien souriante malgré une défaite en double avec sa partenaire russe Evgeniya Rodina contre le duo slave composé de Jovana Jaksic et Barbora Stefkova.
Le fitness d’une joueuse de tennis
Thomas Kieller : Bien entendu, les joueuses qui sont sur le circuit de la WTA sont en grande forme puisqu’elles doivent jouer du tennis de haut calibre. Est-ce c’est quelque chose que tu apprécies l’entraînement?
Annika Beck : Oui bien sûr. Je pense que le tennis pris globalement est un sport complexe. Tu as besoin un peu de tout. Il faut de la puissance, il faut bien réagir et il faut être rapide. C’est vraiment important de combiner la puissance tout en réactif.
Thomas : Tu n’as que 22 ans. Au point de vue de ta condition physique, tu peux t’améliorer… Est-ce que tu aimes bien l’entraînement en salle?
Annika : Oui, j’aime m’entraîner et plus particulièrement pour prévenir les blessures. C’est vraiment important de faire des exercices à l’extérieur du court et de mettre l’emphase sur les parties du corps qui sont les plus sollicitées au tennis comme les épaules, les genoux et les jambes. Pour prévenir les blessures, tu dois faire des exercices de rotation. J’utilise des bandes de résistance (Thera-Bands) et je fais beaucoup de poids libres pour améliorer ma puissance. L’étape suivante est d’adapter cela sur le court en mettant l’accent sur l’aspect réactif qui est bien présent au tennis. Eh bien oui, il faut s’entraîner beaucoup en salle afin d’être prêt.
Thomas : Donc, tu lèves beaucoup de poids libres?
Annika : Oui. Je pense aussi que le calibre sur le circuit s’améliore grandement. Les joueuses sont plus rapides qu’auparavant. Donc, tu dois avoir plus de puissance. Tu ne peux améliorer cela que si tu lèves suffisamment de poids. C’est un aspect vraiment important du jeu.
Thomas : Tu es une joueuse qui joue sur la ligne de fond. Tu cours sur le terrain afin de récupérer les balles et pour bien te positionner. Est-ce que tu fais beaucoup d’exercices de course.
Annika : Oui, j’aime ça d’ailleurs. Ceci m’aide à bien me déplacer sur le court, à avoir des premiers pas rapides et me permet de bien me positionner par rapport à la balle. C’est aussi important pour frapper le coup approprié. Ce sont tous des éléments clés au tennis. Donc, je pense que oui tu dois faire des exercices de vitesse : des sprints, des exercices qui touche l’aspect réactif du tennis tout en faisant aussi des intervalles. Lors d’un entraînement, tu peux aussi courir dans les montagnes. C’est demandant. Pour ma part, je fais ça pour me préparer pour les matchs en succession et pour être capable de soutenir les matchs de trois manches auxquels je prends part. De cette façon, je peux jouer le lendemain sans problème.
Thomas : Aussi, est-ce que tu apprécies faire des exercices cardio-respiratoires?
Annika : Oui, je pense aussi que c’est important. Comme je l’ai dit au début, le tennis est un sport complexe. Tu as besoin de tout.
Thomas : Ce n’est pas tous les joueurs et joueuses qui aiment cet aspect de l’entraînement. Bien entendu, l’endurance fait partie intégrante du tennis…
Annika : Oui. Dès fois, tu participes à des matchs de trois manches et d’autres fois tu joues un match rapide. À vrai dire, un match peut durer plus de trois heures et je dois être prête le lendemain. La récupération est un point très important. Tu dois t’étirer et être flexible pour éviter les douleurs musculaires ou la fatigue que tu peux avoir le jour suivant.
Thomas : La saison commence en janvier. Nous sommes présentement en septembre et la saison n’est pas encore finie. Est-ce que c’est difficile de garder la forme toute l’année?
Annika : Oui, je pense que c’est le cas. Pour tout athlète, il est important de faire un bon calendrier annuel. Tu dois aussi avoir un temps d’arrêt entre les saisons. Durant cette période, je peux à nouveau pratiquer. Comme je l’ai mentionné, je cours en montagne ou à un autre endroit. Sinon, je vais aussi dans une salle d’entraînement pour préparer ma condition physique.
À la fin de l’année, tu es de plus en plus fatiguée, plus particulièrement à ce moment-ci. C’est important d’avoir une bonne récupération parce que lorsque l’entre-saison arrive il faut travailler très fort. Nous tous les joueuses, on s’entraîne beaucoup avant la nouvelle saison. Nous prenons environ deux mois d’arrêt. Je me prépare avec un spécialiste du conditionnement physique et j’y vais à fond. Je passe plusieurs heures à l’entraînement.
Thomas : Donc, tu as deux mois de congé : novembre et décembre. Je ne savais pas. On m’avait dit que c’était seulement décembre.
Annika : Oui. On peut décider à n’importe quel moment d’arrêter de jouer. Dès lors, tu as le temps de te préparer pour la prochaine saison.
Thomas : Tu parlais un peu plus tôt du calendrier. Tu es une joueuse qui a eu sa part de tennis cette année. Je pense que tu as joué déjà 27 tournois cette saison. C’est beaucoup!
Annika : En effet, c’est beaucoup. Je dirais que plus ou moins 25 tournois est le nombre qu’il faut viser. Il faut considérer aussi comment ton corps réagit à tout cela. De plus, il faut tenir compte de ses objectifs : quel rang tu veux atteindre et quel aspect de ton jeu tu veux améliorer. Une autre chose qui influence le nombre de tournois est les résultats obtenus. Au bout du compte, je pense qu’il ne faut vraiment pas dépasser les 30 tournois annuellement. Sinon, tu n’auras pas suffisamment de temps pour pratiquer.
Thomas : Tu voyages constamment d’une ville à l’autre. Est-ce que c’est facile de s’entraîner dans ces conditions?
Annika : À vrai dire, c’est plutôt bien. Aux tournois que je prends part, l’organisation est excellente pour les joueuses. Il y a une salle d’entraînement où l’on peut s’entraîner et il y a beaucoup de terrains de tennis pour pratiquer.
On se sent très bien considérant le décalage horaire. Je pense que toutes les joueuses ont un problème avec cela. Après un vol, il faut être prêt pour le prochain jour que ça soit pour une pratique ou une partie. Chaque personne y fait face à sa manière. Certaines d’entre nous vont courir et d’autres prennent tout simplement le temps de récupérer. Après des années d’expérience, il faut que tu trouves le moyen d’être prêt pour le jour suivant.
Thomas : Tu as commencé à jouer dans la WTA en 2009 à l’âge de 15. Tu es encore bien jeune, mais tu as déjà eu ton lot de matchs de tennis professionnel. Est-ce que c’est difficile de garder sa motivation aussi bien pour le jeu et que l’entraînement?
Annika : Oui, je pense que c’est difficile quand tu es jeune parce que ton corps est entrain de se développer. Tu ne sais pas comment ton corps va réagir à la suite d’un exercice et qu’est-ce que tu veux atteindre avec cela. Quand tu es jeune, tu améliores constamment ton jeu. Tu dois trouver les points que tu veux améliorer et comment y arriver. Après quelques années et avec l’expérience qui vient avec, tu apprends à te connaître. Éventuellement, tu sais comment t’entraîner et ce que tu dois faire. Pour ma part, je me sens bien de cette façon.
Thomas : Avec ton entraîneur Dirk Dier, tu mets l’accent sur quoi présentement (la condition physique, le côté technique du tennis ou la stratégie)?
Annika : C’est un peu de tout. Tu sais la stratégie est toujours importante surtout pour des matchs. En ce qui concerne la condition physique, tu dois être prêt et être en forme. Bien entendu, je veux développer mon jeu. D’ailleurs, je veux jouer plus vite. Je vais faire les exercices qui me permettront de progresser tout en jouant de façon plus agressive. Pour cet aspect du jeu, tu dois avoir plus de puissance. C’est sur quoi nous travaillons présentement.
Thomas : Les trois dernières saisons, ton classement en simple à la fin de l’année était entre la 50e et la 60e place. Tu es actuellement en 38e place. Qu’est-ce que tu veux faire pour progresser dans le classement? Plus de tournois!
Annika (affirme avec passion) : Non! Je ne veux vraiment pas faire plus de tournois. Je veux plutôt développer mon jeu. Bien entendu, je pense que cela nécessite un bon calendrier. Il faut aussi considérer l’aspect mental du tennis qui est vraiment important. D’une certaine façon, tu dois faire des exercices pour l’aspect psychologique du jeu afin de bien réagir dans les situations difficiles. En quelque sorte, c’est lié à la confiance. Si tu te sens en forme sur le terrain et que tu crois que tu peux courir jusqu’à perdre haleine, je pourrais dire que tout va pour le mieux.
Mot de la fin
Thomas : Au bout du compte, après tout cet entraînement, le jour du match tu te retrouves seule sur le terrain de tennis. Comment te sens-tu là?
Annika : Je pense qu’avant tout tu dois avoir du plaisir sur le court. Tu dois avoir confiance que tu bouges bien sur le terrain et que tu frappes de bons coups. Aussi, ce que tu fais, tu dois le faire avec motivation et discipline. C’est vraiment un aspect important. Mais tu dois avoir du plaisir avant tout. Bref, je veux faire un pas à la fois et je verrais où mon développement me conduira.
Thomas : Merci. Continue dans cet esprit!
Annika : Merci!
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